Aurélia Jaubert

« Surprises parties »
Un projet de Lili Chemin et Aurélia Jaubert

Nous bénéficions du soutien de la SCAM  qui a attribué à notre projet en mai 2016,  une bourse d’aide à l’écriture remportée dans le cadre de « Brouillon d’un rêve d’art numérique ».
 Installation vidéo intégrant la réalité augmentée, Surprises parties  est une sorte de petite pièce cinématographique où il est question de transformer, en temps réel,une forme somme toute un peu abstraite – le public habillé – en objet plus concret : le public nu.
Une installation imaginée, en tout premier lieu, en vue de surprendre et faire rire le public , Surprises parties  est une sorte d’invitation à un jeu où il est question d’enfiler une tenue un peu particulière…
Note d’intention :
Nous travaillons actuellement sur un projet d’art numérique interactif – réalité augmentée – imaginé pour divers lieux culturels ( Musées, salles de concerts…) utilisant des outils issus des technologies numériques : incrustation d’images 3D, vidéo…
Nous avons choisi, à titre d’exemple et parce que le lieu est spatieux, le Centquatre pour la réalisation des croquis. Il s’entend que la taille de l’installation peut être ajustée à nombre de lieux différents. Nous pensons, comme autres lieux éventuels de diffusion, à des espaces publics tels que des gares ou des aéroports.
Étonnante surprise party à laquelle nous voilà conviés. Et s’il s’agissait d’un guet-apens, nous laisserions-nous prendre au piège ? Car le piège, ici, semble plutôt prendre la forme d’un amusement – surprises parties – et, à vrai dire, d’un jeu particulièrement convivial.
Lorsque nous entrons dans le lieu, nous déambulons sous un écran vidéo , qui, à la façon d’un miroir, nous renvoi immédiatement notre image, à ce  » détail  » près : nous voilà entièrement nus. Un ensemble de caméras incrustées au-dessus de l’écran, filme l’ensemble des personnes qui se trouvent sous l’écran même. Dans un même temps, à l’aide d’un logiciel spécifique, se fait en amont l’incrustation d’images 3D sur les corps filmés des personnes du public. Ici, il s’agit d’incruster des images de corps d’hommes et de femmes entièrement nus. 
Cette image  » retravaillée »sera transmise à l’aide de vidéo-projecteurs sur l’écran qui se trouve au-dessus de nous. ( cf croquis joints )
Nous voilà nus ! Tout nus !!

C’est dans un vaste espace publique, type halle, que naît l’idée : hauts plafonds, grands espaces de déambulation… Nous y visualisons tout : l’immensité de l’écran tendu très haut au-dessus du public, la longue traversée de cet espace tout en longueur. Ce vide conséquent entre l’écran et les personnes qui se regardent, dessinant alors une sorte de frontière entre le corps habillé, caché, protégé et le corps nu. La distance entre l’écran et le public a un rôle majeur : il ne se rend pas compte immédiatement que l’anatomie et la nudité qui lui sont associées ne sont en réalité pas les siennes. Dans un premier temps, il se reconnaît. Le fait de voir son reflet accomplir exactement les mêmes gestes prouve bien qu’il est filmé. D’où l’inquiétude immédiate… Ce n’est qu’un peu plus tard, et seulement après le moment d’hésitation que le public se rend compte, en observant attentivement, que ce corps-là, ce sexe-là n’est pas le sien… Soulagement ? Au fond, qu’est-ce que ça change ?

Au plafond, une délimitation importante entre l’écran et un espace « libre » donnera le choix au public : la possibilité d’y aller franchement, d’être à découvert, ou la possibilité d’hésiter, de se pencher, tendre un bras, une jambe, voire de se cacher complètement. J’y vais ou je n’y vais pas : chaque spectateur devient, s’il le souhaite, acteur de lui-même, dans une mise en scène assez particulière.

 D’autres champs s’ouvrent alors. Le jeu dans le jeu peut commencer. Une technologie à ce point avancée est-elle possible ? La pub que l’on voyait au début des années 80, avec les « lunettes qui déshabillent » serait-elle devenue réalité ? Plus de trente ans après, on dirait que la technologie a pris un sacré tour d’avance ! Après les vidéo, scanner, échographie, radio, encéphalogramme, détecteur en tous genres… une
échographie de l’intime ?
En bas, le public habillé, le public caché par des codes vestimentaires qui le distinguent les uns des autres : riches, pauvres, femmes, hommes, jeunes, vieux, noirs, blancs. Furieusement chic ou carrément débraillés ? En somme rien d’autre qu’un déguisement. En haut, le reflet ne triche pas complètement : c’est bien nous. L’humanité telle qu’elle est et dont nous faisons partie. Cet ensemble de corps, nus, dont on ne peut rien cacher. Car, finalement, qu’est-ce qu’une intimité révélerait de plus que l’intimité même ? Que raconterait notre nudité ? Comme si notre nudité dévoilait bien davantage qu’une simple plastique. Est-ce vraiment notre sexe que nous cachons ? Ou, en dissimulant cette partie intime, n’avons-nous pas plutôt l’impression de cacher nos secrets – nos solitudes – nos défauts – nos contradictions – nos petits ennuis terrestres ?